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Communiqué de presse


La MOEC OEA – CARICOM à Haïti recommande le retour aux résultats préliminaires après analyse des dix-huit cas de renversement de classement des candidats législatifs

  29 avril 2011

Lors de la publication le 20 avril 2011 des résultats finaux du second tour des élections présidentielles et législatives à Haïti, les résultats préliminaires législatifs dans 17 circonscriptions et un département ont été renversés suite aux décisions prises par le Bureau du contentieux électoral national (BCEN).

Parmi ces 18 décisions, 17 concernent le poste de député dans les circonscriptions suivantes : L’Estère, La Chapelle, Petite Rivière de l’Artibonite, Maïssade, Belladère, Abricot/Bonbon, Petite Rivière de Nippes, Vallières/Carice/Mombin Crochu, La Tortue, Mole Saint-Nicolas, Bombardopolis, Cité Soleil, Anse-à-Galets/Pointe-à-Raquette, Léogane, Grand Goâve, Tiburon et Jacmel. L’une des 18 décisions concerne les deux postes de sénateur dans le Département du Centre.

Les renversements ont suscité des protestations et causé des troubles à travers le pays. Suite à des discussions entre les autorités haïtiennes concernées, la Mission d’observation électorale conjointe (MOEC) OEA-CARICOM a été sollicitée pour analyser les décisions prises par le Conseil électoral provisoire (CEP) sur ces 18 cas. La MOEC a accepté d’analyser les décisions qui sous-tendent les résultats définitifs en ce qui concerne les cas mentionnés ci-dessus et ce, dans le cadre des limites qui lui sont imposées par son mandat.

Dans un premier temps, la Mission a commencé ses travaux au CEP, où ses greffiers ont été mis à la disposition de la MOEC. La Mission a consulté toutes les pièces soumises par les avocats des parties demanderesses et défenderesses ainsi que les décisions du BCEN, ce qui lui a permis de comparer les informations contenues dans les dossiers aux motifs des décisions. Par la suite, la MOEC s’est rendue au Centre de tabulation des votes (CTV) pour entreprendre des vérifications des PV qui ont été comptabilisés ou annulés par les décisions du BCEN, celles-ci menant aux changements de classement des candidats. La Mission a, entre autres, examiné si la mise à l’écart ou la comptabilisation des PV demandée par les plaignants ou les parties contestées était en conformité avec les règles établies par le CEP. La Mission a pris soin de vérifier également la validité des Listes électorales partielles (LEP) contenues dans les sachets des PV présidentiels. Il est important de souligner que les 18 critères pour déterminer la validité des PV sont en conformité avec la Loi électorale et ont été publiés dans le Manuel du CTV autorisé par le CEP.

Sans doute sous la pression des échéances non respectées et d’autres contraintes, il semble que les juges du BCEN ne se soient pas armés de la sérénité et de la patience nécessaire pour faire un travail rigoureux en formulant leurs décisions. Les arguments des deux parties n’y sont ni exposées ni discutées en détail. De façon générale, les décisions ne font que proclamer le gagnant sans décrire les motifs ou le raisonnement ayant conduit à cette décision. Ceci a rendu le travail du BCEN opaque aux yeux des parties impliquées et du public en général.

En général, les décisions du BCEN sont basées sur la demande d’une des parties pour prendre en compte des PV en sa faveur qui ont été mis à l’écart par le CTV ou d’exclure des PV en faveur de son concurrent qui ont été pris en compte et, parfois même, ces deux sollicitudes simultanément. Sans évaluer les preuves et sans motiver sa décision pour accepter ou rejeter une requête, le BCEN a simplement avancé que les preuves étaient suffisantes ou insuffisantes.

Pourtant, et à l’encontre des critères établis par le CEP lui-même, les juges du BCEN ont pris la décision de comptabiliser sans vérification préalable des PV qui avaient à juste titre été mis à l’écart par le CTV. De même, les juges ont pris la décision de mettre à l’écart certains PV conformes aux critères de validité établis par le CEP sans vérifier le bienfondé des allégations d’irrégularité formulées par les candidats plaignants.

Il est important de noter que dans aucun des cas analysés les juges du BCEN ne se sont prévalus de leur capacité d’effectuer des vérifications au CTV, et n’ont pas non plus établi des commissions pour le faire en vertu de l’article 190 de la Loi électorale. Ceci a profondément affecté le bienfondé et la validité des décisions rendues. Il est à noter également que les parties qui questionnaient la mise à l’écart ou la prise en compte de PV n’ont pas toujours apporté de preuves solides ou pertinentes pour justifier leurs allégations. Les parties plaignantes n’ont pas non plus démontré que la mise à l’écart de PV en leur défaveur n’était pas justifiée au regard des critères établis et publiés par le CEP.

En l’absence de la motivation des décisions; en l’absence de la vérification préalable au CTV de la part du BCEN en conformité avec l’article 190 de la Loi électorale pour déterminer quels PV devaient être mis à l’écart ou pris en compte pour changer le nombre de votes et, par conséquent, le classement des candidats, la MOEC recommande un retour aux résultats préliminaires dans chacun des dix-huit cas examinés.

Référence : F-645/11